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Étudier à l’Étranger

Étudier à l’Étranger: Faut-il privilégier la Qualité ou la Quantité ?

Les étudiants des universités américaines étudient plus que jamais à l’étranger. Ils y suivent des cours ou s’inscrivent à des programmes d’été ou semestriels. Selon l’Institute of International Education, 205983 étudiants américains ont étudié à l’étranger lors de l’année universitaire 2004-05, ce qui représente une hausse de 144% au cours des dix dernières années.

Potentiellement, c’est bien, pour les étudiants, pour les intérêts des États-Unis à l’étranger et pour le monde entier. L’enseignement au niveau international peut améliorer notre compétitivité dans le monde. Les étudiants ayant voyagé et étudié à l’étranger sont mieux à même d’accroître leurs capacités d’appendre les langues et les cultures. Ils sont plus confiants et s’impliquent davantage dans leurs objectifs universitaires. Ils ont plus d’assurance, d’estime d’eux-mêmes, d’autonomie, de confiance en eux-mêmes, de flexibilité, de maturité, sont plus indépendants et ont davantage de compétences au niveau social. Pour être à la hauteur dans ce monde dit « plat », beaucoup des compétences nécessaires sont acquises lors de voyages internationaux et par une immersion dans des cultures différentes.

Alors que cette façon alternative d’étudier se développe, il est bon de rappeler que les résultats souhaités pour les études à l’étranger ne sont ni systématiques ni garantis dans les conditions actuelles. De même, la réussite ne peut pas être évaluée par le nombre d’étudiants envoyés à l’étranger. Ce qu’il nous faut c’est de la volonté et de la détermination, et nous pourrions commencer par faire la différence entre les « modèles traditionnels » et les « nouveaux modèles » d’enseignement au niveau international.

En suivant les modèles traditionnels, les universités et organisateurs de programmes envoient les étudiants dans des pays étrangers sans les y préparer au préalable et finalement ils n’en tirent qu’une maigre expérience au niveau culturel. Ils font le minimum d’effort pour apprendre les langues et coutumes locales, ils voyagent en groupe et leurs salles de classe sont composées uniquement d’Américains. Ils n’habitent et ne sortent qu’entre Américains, boivent souvent trop et s’attirent des problèmes. Ils ne visitent qu’à travers les vitres des cars de tourisme. Ils sont loin de l’immersion culturelle proprement dite, au mieux ils font l’expérience d’une année d’études universitaire mais dans un lieu au fuseau horaire différent. Il faut noter que bon nombre de ces destinations réputées « superbes » ne nécessitent ni l’apprentissage d’une langue ni l’effort minimum pour découvrir des sites ou une culture. C’est aussi vers ces destinations que l’on trouve le pourcentage le plus élevé d’étudiants de niveau supérieur.

Les nouveaux modèles d’études à l’étranger sont conçus pour garantir une profonde immersion culturelle et linguistique. Les étudiants sont amenés à comprendre et à respecter les habitudes locales, ils sont aussi encouragés à donner une image positive des Américains. Les organisateurs de ces nouveaux modèles permettent aux étudiants de partager la culture locale en les logeant dans des familles d’accueil, lesquels en contrepartie, interviennent dans les collectivités locales. Ces étudiants deviennent de jeunes émissaires interculturels, des citoyens du monde capables de s’adapter et d’apporter à ce monde complexe.

Les programmes suivant le nouveau modèle sont en général basés sur quatre principes

  • Faciliter l’accès au plus grand nombre d’étudiants. Actuellement moins de 8% des étudiants américains étudient à l’étranger, et ce malgré des sondages indiquant que la plupart a intérêt à le faire. Autre donnée également importante: moins de 9% de ce faible pourcentage sont noirs ou hispaniques alors que ces derniers représentent 25% des étudiants dans les universités. Pour le dire autrement, 50% de ces étudiants allant à l’étranger sont originaires de seulement 100 universités. Il nous faut faire mieux.
  • Inciter davantage les étudiants à choisir des destinations moins fréquentées par les touristes et dont la langue est moins parlée. Les deux tiers de ceux qui étudient à l’étranger le font en Europe. Seulement 15% vont en Amérique latine, 7% en Asie, 3% en Afrique et 5% au Moyen-Orient. Alors que la puissance économique et géopolitique change, d’importants pays émergents devraient être inclus dans les destinations des étudiants. Ces derniers doivent bien entendu continuer d’aller en Europe mais ils devraient choisir un programme leur permettant d’apprendre les langues et de s’immerger profondément dans les cultures et d’être confrontés à d’importants sujets de la société européenne contemporaine.
  • Établir des projets pour les étudiants après leur retour et les aider à s’engager sur le long terme. Une fois rentrés chez eux, les étudiants débordent d’énergie et d’enthousiasme, leurs expériences les ont métamorphosés, mais ils ne trouvent que peu débouchés et de portes de sortie pour canaliser cette énergie acquise. Il nous faut exploiter cette dernière et l’utiliser pour la formation continue, le progrès et l’engagement dans les collectivités. Dans l’enseignement supérieur, il y a eu beaucoup de bavardage sur l’enseignement civique et l’engagement des étudiants. Si on les exploite à bon escient, les études à l’étranger pourraient s’avérer être la solution, comme nous le verrons.
  • Assurer une réciprocité. Dans ce contexte on peut obtenir la réciprocité dans nos programmes en renforçant les partenariats (associations, particuliers et collectivités) dont dépend la vitalité de nos programmes. L’enseignement international peut être perçu soit comme une action de plus qu’entreprend les Etats-Unis aux dépens du reste du monde soit comme une action représentant des avantages sociaux et économiques pour les pays hôtes et pour leurs collectivités. Les organisateurs de ces nouveaux modèles sont partenaires avec les collectivités hôtes. Ces dernières ont besoin des revenues, réseaux et autres ressources que ces organisateurs leur apportent, lesquels, en même temps, interviennent peu et de façon respectueuse.

Certains organisateurs font cela en surveillant la direction des opérations. Ils font intentionnellement appel à des entreprises locales, interviennent à peine, et indemnisent le personnel local avec de bonnes rémunérations, des allocations et offrent des opportunités pour le développement professionnel. D’autres organisateurs utilisent la recherche dans la collectivité et les projets d’apprentissage par le service afin que les étudiants contribuent au développement local. The International Partnership for Service-Learning and Leadership en est un bon exemple.

Mais la réciprocité peut et doit signifier bien plus. Par exemple, la School for International Training (SIT), où je travaille, a récemment signé une convention avec la Royal University of Bhutan dite RUB. Cette dernière accueille et loge les étudiants sur son campus pendant un mois. En échange la SIT utilise notre réseau de 250 universités pour permettre à la RUB d’accéder à l’enseignement supérieur américain. Nous avons organisé un voyage pour que les administrateurs de la RUB rencontrent leurs homologues de plusieurs universités publiques et privées. Nous plaçons les étudiants de la RUB, qui ont été sélectionnés, dans des programmes de doctorat. Pour y parvenir (et pour fermer la boucle) nous proposons aux universités, qui acceptent les étudiants de la RUB, une aide financière pour leurs étudiants afin qu’ils participent à nos programmes. En outre, nous prenons des dispositions pour que les universitaires se rendent à Bhoutan. De cette façon, la réciprocité met en relation tous les partenaires en boucle, ce qui bénéficie aux universités américaines, aux organisateurs de programmes à l’étranger et aux collectivités partenaires qui ont des projets et des objectifs clairs.

Tout cela soulève des questions intéressantes qui n’ont pas encore été débattues entièrement :

  • Serait-ce bien si les programmes d’études à l’étranger diminuaient rapidement en quantité mais augmentaient en qualité? Que se passerait-il si l’indicateur clé de réussite passait du nombre de participants à l’ampleur des résultats de l’apprentissage?
  • Comment les universités pourraient-elles faire pour créer une demande du marché pour ces nouveaux modèles de programmes? En fonction des changements dans l’accréditation, que se passerait-il si les universités exigeaient des organisateurs de programmes d’études à l’étranger de prouver comment les programmes atteignent ces objectifs en ce qui concerne l’apprentissage, et de mesurer les réussites et les échecs?
  • Comment pouvons-nous assurer une meilleure accessibilité? C’est un problème très important qui dépend en partie du prix. Nous devons être créatifs dans nos méthodes pour offrir des programmes à des prix abordables. Il s’agit aussi de déplacer les programmes d’études à l’étranger de la sphère des études littéraires vers des enseignements professionnels. Il nous faut des programmes pour des participants qui font des études pour être infirmiers/ères, médecins, de commerce, d’ingénieurs et de toute une gamme d’autres professions qui ne se limitent pas aux disciplines littéraires dans les universités.

L’enseignement supérieur est sous une pression grandissante de la part des politiques, des parents et même de nos propres agences d’homologation afin de démontrer plus clairement le bénéfice pour les étudiants, pour les collectivités et pour la nation. Étudier à l’étranger est un bon exemple de la façon dont nous abordons quelque chose que nous avons déjà commencé et dont nous décuplons les effets en ayant davantage de projets et d’objectifs concernant les résultats souhaités et la stratégie pour les atteindre. En faisant cela, nous préparons mieux l’enseignement supérieur à relever les défis que représentent la compétitivité mondiale et la diplomatie publique, tout en améliorant notre engagement humanitaire dans le monde

Adam Weinberg est vice-président exécutif de World Learning, il fut également en même temps le président de la School for International Training.

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